le blog poesieducorps

Je suis belle, ô mortels, comme un rêve de pierre,

Et mon sein, où chacun s'est meurtri tour à tour,

Est fait pour inspirer au poète un amour

Eternel et muet ainsi que la matière.

 

Je trône dans l'azur comme un sphinx incompris ;

J'unis un coeur de neige à la blancheur des cygnes ;

Je hais le mouvement qui déplace les lignes,

Et jamais je ne pleure et jamais je ne ris.

 

Les poètes devant mes grandes attitudes,

Qu'on dirait que j'emprunte aux plus fiers monuments,

Consumeront leurs jours en d'austères études ;

 

Car j'ai pour fasciner ces dociles amants

De purs miroirs qui font les étoiles plus belles ;

Mes yeux, mes larges yeux aux clartés éternelles !

 

Charles Baudelaire

Ven 21 oct 2005 Aucun commentaire